Histoires

Essai Ducati 916

Pont-Canal

Une 916 à Briare

Essai par Ludovic "Waterwolf" Valois

La 916 est apparue en 94. Quatre ans après le mythe n'a pas pris une ride. A tel point qu'elle n'a cessé d'être imitée tant au niveau du look qu'au niveau moteur par la concurrence japonaise.

Imitée certes, maisjamais égalée.

La presse moto ne cesse de l'encenser comme étant "la bête" de circuit par excellence tout en lui reprochant d'être par trop exclusive. Il est clair qu'on ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre.



cerf-volant

Yellow & Black

Dans le cas de la 916, Ducati n'a pas fait dans la demi-mesure. Sa taille de guêpe, sa position très très en appui sur l'avant et son amortissement ferme ne laissent planer aucun doute quant à sa vocation. Il ne s'agit pas d'une GT, ni d'une sport GT : c'est un pur-sang sans concession que je déconseille au poireau de la première heure ou à l'amateur habitué aux sportives japonouilles qui savent tout faire(même de la ville).

La Ducati 916 est à la moto ce que la Ferrari DinoSpider 246GTS était à l'automobile. Je ne m'étalerai pas sur le confort de cette moto, il est inexistant.

Parlons plutôt de son look dévastateur. Sa célèbre double optique, sa ligne de sylphide allégée 0%, son côté ramassé et anguleux. Tout contribue à en faire une oeuvre d'art. La ligne n'a pas pris une ride et restera longtemps comme un modèle pour les productions à venir des sportives modernes.

Le cadre tubulaire, le mono bras arrière avec des roues à trois bâtons renforcent encore cette impression de légèreté et d'agressivité.

Le tableau ne saurait être complet sans mentionner la couleur. Nul trait de feutre sur cet engin, juste une couleur unie du plus bel effet. Normalement une Ducati est rouge Ferrari mais dans certains cas (le mien notamment) elle est jaune Ferrari.

Ensuite il y a " The Moteur ". Et là, force m'est d'avouer que rien de ce que je connais ne peut égaler la joie qu'il procure. C'est un twin donc c'est coupleux, certes. Mais ce n'est pas tout ! Il suffit (après avoir fait chauffer la bête) de se prendre au jeu d'une conduite un peu appuyée pour l'apprécier pleinement. Ce moulbif pousse dans les tours comme un diable.

Même avec les pots d'origines la mélodie est envoûtante et on se prend vite à mettre un gros coup de gaz pour l'entendre vrombir puis à tout couper pour l'entendre feuler tel une chatte en chaleur. Il est relativement souple en bas et la boite est remarquablement précise. En un mot comme en cent : " du vrai bonheur en barres avec des morceaux de plaisir dedans ".

Angle

A l'attaque...

La partie cycle n'est pas en reste. Il s'agit même d'une des meilleures qu'il m'ait été donnée d'essayer. Certes, la moto demande un peu de savoir-faire, mais une fois sur l'angle rien ne pourra la perturber. Dans un enchaînement de petites courbes cette moto est réellement bluffante. On la jette d'un angle à l'autre sans effort. Ca passe fort, très fort même.

C'est bien simple, il faut aller faire un tour sur circuit pour vraiment se rendre compte de sa vraie nature.

Revers de la médaille : elle est insupportable sur petites routes bosselées. Un vrai bout de bois et il faut avoir les reins solides pour ne pas abandonner au bout de 50 bornes.

Malgré tout la moto ne bronche pas. Elle tressaute, elle guidonne, elle perd ses boulons mais elle reste sereinement calée sur sa trajectoire.

En résumé, il s'agit de la moto la plus exclusive du marché. Tant au niveau du prix, qu'au niveau de son utilisation. C'est une véritable moto passion tant elle procure des sensations uniques (voire iniques).

La reine 916 saura reconnaître les siens.


oliv

C'est mignon les petits guidons. Faudrait pas que ça grandisse...

L'avis du biker :-)    par Olivier "Becanosaurus Rex" Hermon

A l'arrêt, cette moto gagnerait à faire un peu plus de bruit côté échappement, d'autant que l'embrayage-crécelle est particulièrement peu discret. Cela peut facilement s'arranger avec des pots Termignoni.

Juste avant de partir, je m'apercois que la visière pare-soleil de mon jet (je n'ai jamais pu me faire aux caques intégraux) me bouche toute visibilité au-dela des compteurs et je l'enlève. Et me v'la parti avec la tête en l'air et le cou cassé a 90 degrés pour regarder la route. Surement qu'avec de l'accoutumance on peut regarder la route sans se forcer, je veux bien le croire, mais au bout de 200 mètres je suis tenté de ramener la moto tout de suite tellement la position me semble inconfortable. :-)

Pour le haut du corps, tu te retrouves comme allongé sur un lit à plat ventre, mais avec la tête tirée en arrière au maximum, les bras allongés et les poignets comme menottés.

Pour le milieu du corps, c'est encore moins glorieux : tu as les fesses en l'air telle la chienne soumise attendant son étalon. :-))

La position des jambes et des pieds ne pose pas de problème, elle est même parfaite si on tient compte que les commandes pourtant minuscules tombent exactement là où il faut.

 

Mais je vais quand même pas rendre ce bijou transalpin sans au moins rouler un peu, non ? Je pars donc explorer une petite route côtière de la Bretagne.

Cette moto est frustrante parce que tu sens bien qu'elle a été concue dans le seul but d'aller très vite et de tirer des trajectoires parfaites. Et là, sans la connaitre, sans voir la route et sur un itinéraire bosselé et gravillonneux, je suis à des années-lumière de la perfection qu'elle attend.

J'enroule donc...

Trois mille tours sur le dernier rapport, elle fait ça moins bien que les twins américains et donc il faut accompagner un peu plus fort, ce qui fait tout de suite 120-130 km/h, donc un peu vite pour cette route et ma totale méconnaissance de la moto.

Je roule une dizaine de kilomètres à une vitesse qui est tout sauf régulière : et j'accélère et merde ça va trop vite alors je coupe, et v'la un Espace de vacanciers je mets gaz pour l'atomiser, putain que ca pousse ce truc la, damned si je passe a cette vitesse sur les gravillons ça va devenir délicat, je freine, tiens ça freine pas si tant bien qu'une 888 à disques fonte, peut-être même pas si tant bien que mon Sportster, ah tiens un bout droit, je suis en 2ème, allez j'ouvre, ouch nom de diou, ça en finit pas de prendre des tours ce machin et pis alors qu'est-ce que ça pousse à partir de 4 000, c'est pas croyable, tiens, me v'la arrivé au bout du Cap Frehel, bon je fume une clope pour analyser...

Au re-démarrage, j'accélère franchement sur la première et hop la roue avant se lève sans que j'ai rien demandé. Infernal. J'ai pas cherché du tout à être brutal sur l'embrayage, au contraire je l'ai lâché progressivement et j'ai même pas tourné la poignée comme une brute.

Je reviens avec beaucoup plus de facilité qu'au départ, la conduite devient plus naturelle : les virages passent mieux, je m'habitue, je commence à sentir comment elle aime être emmenée. Maintenant, je dois la contrôler suffisamment pour être à facile 30 % de ses possibilités. Ah la garce ! :-)

Pour bien faire, faudrait que je passe une centaine de bornes sur une Nationale dégagée avec cette moto afin de me faire une idée, non sur ses possibilités que je sais énormes, mais sur la manière de l'exploiter correctement.

C'est à coup sur une moto fantastique. Avec un moteur fabuleux, ça y a pas de doute. Elle n'est pas faite pour moi, y a pas de doute la-dessus non plus.

Je la sens tellement fine, tellement précise, tellement vive et performante que je suis sur qu'elle est dangereuse. Très. La maîtresse tyrannique et absolue ! Je comprends très bien maintenant pourquoi elle fait tant bander ses propriétaires.

En fait, si on ne voit pas la route quand on est sur elle, c'est peut-être parce qu'elle baise trop bien. :-)


916   -   Caractéristiques techniques

916 a poil

Moteur
Distribution
Cylindrée
Rapport volumétrique
Puissance, couple maxi
Alimentation
Lubrification
Mise en route
Allumage
Boîte de vitesses
Embrayage
Transmission secondaire
Cadre
Angle de colonne / chasse
Suspension avant
Suspension arrière
Frein avant
Frein arrière
Pneus
Hauteur de selle
Empattement
Garde au sol
Essence
Poids avec pleins
Répartition
bicylindre en L a 90°, 4T, refroidi par eau
4 ACT courroie, 8 soupapes, comm. desmodromique
916 cm3, alésage 94 x course 66
11 à 1
100 ch à 9 000 t/mn, 9 m/kg à 7 000 t/mn
inj. électr. indirecte Weber
sous pression, carter humide
démarreur électrique
électronique type CDI
à 6 rapports
multidisque à sec, commande hydraulique
par chaîne
treillis en tubes d'acier au chrome molybdène
réglable de 23,30 à 24,30 degrés / 91 à 97 mm
télescopique réglable déb. 127 mm, diam. 43
monobras, combiné unique, déb. 130 mm
double disques flottants 320 mm
simple disque 220 mm
120/70x17 AV et 190/50x17 AR
790 mm
1 410 mm
150 mm
17 l, dont réserve 4 l
218 kg
48,5% AV, 51,5% AR

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