Fred est en route pour le Népal.
Il rencontre à New-Dehli un enfant qui changera sa vie : le Petit
Prince...
-
- Dehli, samedi
- Alors, celle-1à, elle est forte. En voyage, on
peut s'attendre à des tas d'aventures plus ou moins bizarres, surtout
quand on se balade avec une moto comme ma Puce, qui connaît tous
les secrets de la magie orientale; tout de même, celle-là,
vous ne la devinerez pas! Savez-vous ce que viennent de donner bientôt
quatre ans d'union entre Mademoiselle Puce Yamaha et moi-même?...
Non....Si?. Oui.
- On vient d'avoir un enfant. Ça, aucun expert gynécologue
ne l'avait prévu, mais c'est arrivé. J'ai téléphoné
à Marcel du bar de l'Esplanade pour lui signaler l'événement,
parce que Marcel trouve toujours des explications à tout. Il a été
catégorique: . Ben oui, faut croire. Il faut que je vous raconte
comment c'est arrivé.
- Je vous ai fait des cachotteries: tout a commencé
le surlendemain de mon arrivée à Delhi, mais ça m'avait
paru tellement irréel, et le résultat d'aujourd'hui tellement
improbable que je ne vous en avais pas parlé.
- Le surlendemain de mon arrivée à Delhi,
sitôt la Puce sortie de douane, on est allé au consulat du
Népal pour demander un visa, parce que Kathmandu était important
pour moi. Je remplis le formulaire, on m'annonce que si je veux attendre,
je peux avoir le visa aujourd'hui-même. O miracle, un visa obtenable
le jour-même, c'est presque unique, Glory be, Alleluia!
- Je ressors acheter un journal puis m'en vais dans la
salle d'attente. Tiens, il y a déjà du monde qui attend.
Un couple de baba-kool avec un gamin de sept-huit ans avec les cheveux
blonds sur les épaules. Eh merde! IIs parlent, lls sont français!
- Les baba-kool, c'est pas vraiment mon trip. Chuis pas
militariste du tout mais pas non plus pacifiste bêlant, chuis pas
écolo, et j'dis pas que j'aie jamais fumé des pétards
mais c'était à Copenhague en 71 dans une communauté,
ça duré une semaine, la belle affaire...
- Bon, ils sont français. Ça doit être
bon de parler français...
- Nous voilà routards à nous raconter des
histoires de routards. Eux sont partis avec une fourgonnette deux-biques
qu'ils ont abandonnée en Afghanistan. Ils me racontent. Puis je
leur raconte. J'en suis à leur conter comment de la montagne lunaire
en Jordanie, on voit d'un coup apparaître la mer Rouge, que l'on
arrête son moteur pour se laisser descendre comme un tapis volant.
- V'là le gamin qui m'interrompt sans lever la main
et qui me dit, b-ism Illah je vous le jure:
- Dessine-moi le tapis volant.
- Eh merde le petit salaud... Mon coeur a fondu....
- Si t'as pas lu Le Petit Prince de St Ex', t'es pas trop
allé à l'école, camarade. Bon, ça m'a peut-être
marqué plus que la moyenne à cause des baobabs. Toujours
est-il que c'était le Petit Prince. Un petit gamin aux cheveux blonds,
rencontré loin, loin de chez moi, qui me demande dans ma langue
de lui dessiner la descente sur la mer rouge, c'est encore plus coton que
la laine d'un mouton, parole...
- J'ai dû faire le coup du chais pas dessiner comme
dans le bouquin, et ça m'a tout remué.
- Une paire d'heures plus tard on avait nos visas, on sort
du consulat, l'aspirant Petit Prince regarde la Puce c'est vrai que Puce
est presque à sa taille.
- A l'arabe, je propose à toute la clique de prendre
le thé à mon hôtel. Quand j'y pense maintenant, ils
ont dû trouver ça shadock. Offrir le thé! Puis ils
m'ont invité à fumer un pétard à leur hôtel,
et le petit m'a demandé "tu m'emmènes faire un tour
à moto?"
- Il devait être trois heures de l'aprem', eh, pourquoi
pas? Je n'avais pas encore visité Delhi, pourquoi ne pas le faire
à deux?